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Buteurs maison : Les purs et durs

Buteurs maison : Les purs et durs

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Publié le 26/03 à 08:47 - LFP

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Leurs noms riment avec Ligue 2 BKT. Ils ont marqué ce championnat depuis les années 2000. Retrouvez les principaux buteurs maison de la période.

Au cours des deux dernières décennies, la Ligue 2 BKT a vu passer et le plus souvent s’installer plusieurs buteurs maison. Et cela notamment récemment en Corse du côté de l’AC Ajaccio qui, à travers le dernier prêt réussi de Gaëtan Courtet, a rappelé qu’il a toujours fait confiance aux attaquants d’expérience, rompus aux joutes de la Ligue 2 BKT. Car avant lui, les Ajacciens comptaient sur un autre trentenaire, Ghislain Gimbert, à la pointe de leur attaque ; lui-même arrivé après les Richard Socrier (60 buts), Jean-Jacques Mandrichi (52 buts), Nicolas Fauvergue (51 buts) et Jean-François Rivière (75 buts). Mais c’est bien Gimbert qui figure en tête du classement historique des buteurs de ce championnat sur les 13 dernières saisons (91 buts).

Gimbert, attaquant 100% Ligue 2 BKT !

Et si l’attaquant peut se vanter de dominer le classement des buteurs historiques depuis 2007, c’est surtout grâce à sa capacité d’adaptation. Partout où il est passé, il a marqué en Ligue 2 BKT. Cet attaquant a la particularité d’y avoir disputé 421 matchs et aucun à l’échelon supérieur. En Corse, Ghislain Gimbert – comme Courtet – a compté sur la confiance totale du staff. Il y a évolué seul en pointe pour profiter des caviars des Coutadeur, Cavalli et Nouri « pour s’épanouir et prendre son pied sur le terrain ».

Comme pour d’autres, le talent de Ghislain Gimbert n’a jamais eu l’occasion de prendre parmi l’élite, lui qui a manqué la montée avec les Havrais pour un petit but en 2016… Son ancien partenaire ajaccien, Riad Nouri n’a pas eu davantage l’occasion de montrer son talent parmi l’élite : « c’est ma déception de ne pas y avoir goûté. Je ne sais pas ce qu’il m’a manqué. Peut-être plus de régularité. » Du haut de ses 74 réalisations dans l’antichambre, ce buteur « made in Ligue 2 BKT » a également percé tardivement, en marge du parcours classique. « A 20 ans, je ne pensais même pas au foot professionnel, mais une fois en D2 je n’ai plus rien lâché », championnat dans lequel il a connu 322 apparitions en dix ans. Ce milieu offensif y a d’ailleurs le plus souvent joué le maintien, à l’image de ses débuts avec le FC Istres de José Pasqualetti en 2009. Là-bas, il y a beaucoup progressé au contact de Nassim Akrour (98 buts en 303 matchs de Ligue 2), un de ces joueurs qui a servi d’exemple à de nombreux jeunes au cours de sa longue carrière. Riad Nouri est donc ensuite devenu un spécialiste de ce championnat du côté de Nîmes, où ses performances lui ont permis de rêver à la Ligue 1 Uber Eats jusqu’à ses 33 ans : « j’avais eu des contacts avec Troyes, Angers et le GFC Ajaccio, qui venaient de monter. Finalement, cela ne s’est pas fait avec Angers, avec qui les contacts étaient les plus avancés. Je n’ai jamais su pourquoi, d’ailleurs. » Puis il y a donc eu l’AC Ajaccio, où il a fini par jouer pour la première fois de sa carrière la montée, avec les Barrages perdus en 2017/18.

Une aventure qu’il a donc partagée avec Ghislain Gimbert, dont l’ACA (18 buts) a été le 8e club en Ligue 2 BKT, après Grenoble (4 buts), Tours (2 buts), Libourne Saint-Seurin (6 buts), Vannes (14 buts), Laval (19 buts), l’ESTAC (18 buts) et le HAC (16 buts). Une belle régularité pour celui qui a marqué au moins six fois lors de dix saisons. Passé pro à Grenoble sous les ordres de Thierry Goudet, retrouvé au HAC en 2015, Ghislain Gimbert avait signé dix ans auparavant sa toute première réalisation au GF38 neuf minutes après son entrée en jeu. « C’est un vrai buteur, comme peut l’être Mathieu Duhamel, avec plus d’espace et des qualités vitesse », analysait Goudet à l’été 2015, comparant deux références offensives du championnat.

Cette riche expérience permet ainsi à Ghislain Gimbert de figurer en bonne place parmi les mythiques buteurs qui ont animé les soirées de ce championnat depuis les années 1980 de Robert-Diochon à Gaston-Petit, en passant par Pierre-Brisson et Deschaseaux ; tels que les Jean-Pierre Orts (182 buts, meilleur buteur de l’histoire du championnat de Ligue 2 BKT), Bruno Roux, Robert Malm, Samuel Michel, Réginald Ray, Laurent Dufresne, Didier Monczuk, Amara Traoré, David Suarez, Grégory Thil ou encore Cédric Fauré.

Ancien Ajaccien, Jean-François Rivière a lui aussi été actif sur le front des attaques en Ligue 2 BKT pendant plus de 300 rencontres de Laval au Gazélec en passant par Amiens, Niort, Angers et l’AC Ajaccio pour 79 buts comptabilisés. S’il n’a jamais foulé les pelouses de l’élite, il a activement contribué à la montée du club corse en 2011, lorsqu’à 34 ans son doublé à Nîmes (1-2, J38) a validé le billet ajaccien. « Malheureusement j'étais en fin de contrat et on ne s'est pas accordés sur un renouvellement. », expliquait-il à l’annonce de sa retraite en 2014, après avoir déjà dit qu’il aurait « bien aimé titiller la L1 pour voir » s’il était capable d’y faire quelque chose après 16 ans d’attente.

Un sentiment certainement partagé par Guilherme Mauricio qui du côté de Francis Le Basser a été un autre type de ces spécimens. Un de ceux qui ont enfilé les buts comme des perles dans ce championnat, mais jamais au niveau supérieur. A Laval, où Franck Bonora venait de scorer 27 fois en deux saisons de D2, Guilherme Mauricio a été une légende avec ses 79 buts inscrits en neuf saisons (de 1999 à 2006 et en 2008/09). Or, l’ex-Tango n’a jamais franchi la frontière le séparant de l’élite. En 2e Division, il a notamment signé cinq triplés avec le Red Star, son premier club, et Laval, dont un sauvant les Tangos de la descente en National en 2003/04. Au final, Mauricio est l’auteur de 119 buts en championnat après une dernière aventure castelroussine (2006-2008).

Plus performants en Ligue 2 BKT

Parmi les grands buteurs s’étant faits un nom en Ligue 2 BKT, il en existe qui ont eu leur chance dans l’élite. Parmi eux, une fois en Ligue 1 Uber Eats, certains y ont connu quelques embuches, avant de retrouver leurs bases à l’échelon inférieur.

Le dernier en date est sans doute Mickaël Le Bihan. Sacré meilleur buteur de Ligue 2 BKT, il y a cinq ans (18 buts), l’attaquant auxerrois a connu une joie de courte durée lors de son arrivée parmi l’élite avec l’OGC Nice.

Alors que son titre individuel lui avait ouvert les portes de la Ligue 1 Uber Eats, il n’a pu y disputer que 26 rencontres en quatre saisons… « J’ai perdu trois ans », a résumé le joueur au sujet de cette aventure au Gym. La faute à de grosses blessures qui l’ont fait penser arrêter sa carrière… A 29 ans, l’attaquant a ensuite retrouvé des couleurs en reprenant la route de la Ligue 2 BKT, à l’AJ Auxerre, en y retrouvant la réussite. Non sans admettre que cela « a été compliqué dans ma tête de me dire de retourner en Ligue 2 BKT, mais après c’était mon choix », déclarait l’ancien aiglon sur France Bleu à son arrivée en Bourgogne. « Je préfère être sur le terrain prendre du plaisir à ce niveau avec un peu moins de monde et un contexte différent que d’être en Ligue 1 Uber Eats sur le banc, regarder les copains, rentrer en fin de match ». En attendant peut-être une autre chance d’y évoluer, Le Bihan est « déçu » de son expérience de l’élite, lui qui « aurait voulu prouver ». En 2015, l’attaquant avait tout fait pour rejoindre la Côte d’Azur : « Je ne veux pas passer à côté de mon heure. Jouer en Ligue 1 Uber Eats, c’est le rêve de chaque gamin. Aujourd’hui, on m’offre la possibilité de réaliser mon rêve. Je ne veux donc pas rater le train ».

Autre actuel attaquant en quête de confirmation à l’étage supérieur, Umut Bozok (ESTAC). En 2017/18, le Nîmes Olympique de Bernard Blaquart a retrouvé la Ligue 1 Uber Eats grâce à une attaque flamboyante, la meilleure du championnat (74 buts), portée justement par la révélation Umut Bozok qui a connu « une saison très aboutie ».

Comme avant lui Savidan, Thil et Fauré, le Franco-Turc est parvenu à être sacré top buteur de Ligue 2 BKT après l’avoir été en National. Comme eux, Bozok y a connu un passage imposé pour trouver une porte d’entrée dans le monde professionnel. « En prenant le meilleur buteur du National, il y avait des chances qu'il nous mette quelques buts en Ligue 2 BKT. Mais on ne pensait sûrement pas qu'il en claque autant et aussi vite », reconnaissant le tacticien gardois à la Montagne en hiver 2017.

Mais en grimpant de deux divisions en deux saisons, l’attaquant a pu constater de l’écart entre les deux championnats, où il était devenu le premier jouer à signer trois triplés sur une même saison depuis 20 ans... « Cela a été une année très compliquée. C’était dur au jour le jour, j’étais un peu seul. » Face à davantage de concurrence une fois dans l’élite, l’ex-Croco a pu constater que « techniquement les joueurs se trompent beaucoup moins. En Ligue 2, tu as une seconde chance, en Ligue 1, si tu te trompes, bon courage…mais je sais que j’ai le niveau ». En 2019/20 avec le FC Lorient, Bozok s’est affiché comme « un revanchard », a estimé son coach Christophe Pélissier. Car l’objectif de l’attaquant a été au cours de toute cette saison passée dans l’antichambre de retrouver un jour la Ligue 1 Uber Eats. « Peu importe le temps que cela prendra. Un, deux ou trois ans… », estimait-il à l’été 2019.

Thil, monument du Nord

Auteur de 63 buts en Ligue 2 BKT, Grégory Thil est un autre exemple d’un goleador qui a manqué son rendez-vous avec la Ligue 1 Uber Eats. Un que Steve Savidan aurait très bien pu ajouter à sa liste lorsqu’il évoquait ces buteurs qui auraient mérité un tout autre avenir parmi l’élite. D’autant que les deux hommes sont amis après une expérience commune, bien que très mitigée, à Beauvais.

Son « état d’esprit et ses qualités physiques » sont repérés par Jacky Bonnevay qui lui donne sa chance dans l’Oise, où il signe pro à 21 ans (2001). Là-bas, il forme donc un duo avec un autre espoir Steven Savidan, prêté par Châteauroux. Sans grand succès, Grégory Thil marque quatre buts, dont un après seulement 14 secondes de jeu à Caen, et une descente en National. « J’étais impressionné, timide », avouait l’attaquant en se rappelant cette époque en 2007. De retour chez les amateurs, l’attaquant profite d’évoluer sous les ordres de Bruno Roux, ancienne idole maison : « Il ratait tous ses duels. On a tout repris de zéro ». Une association entre buteurs pouvant rappeler celle entre Garande et Duhamel à Caen.

Une expérience précieuse qui lui permet de devenir une légende de l’US Boulogne (34 buts lors des saisons 2007/08 et 08/09). Le meilleur buteur du National en 2007 et de Ligue 2 BKT deux ans plus tard voit une blessure à la cheville casser son élan lors de la montée des Nordistes en Ligue 1 Uber Eats. « J’étais en pleine ascension, j’étais mature. C’est dommage. J’aurais aimé vivre une saison pleine à Boulogne en Ligue 1 Uber Eats pour voir ce que ça aurait donné. », se confiait-il à So Foot en septembre 2019. Idem avec Dijon en 2012/13, où cette fois c’est son genou qui le lâche. Pourtant en 2009, Jacky Bonnevay le voyait aller plus haut : « Des attaquants de cette trempe ne se trouvent pas si facilement. On ne sait où il va s’arrêter. Ça a marché pour Savidan et Gignac, des garçons atypiques comme lui ». Une comparaison qui n’a finalement pas été au-delà pour Grégory Thil, dont les plus grands exploits restent ceux réalisés au stade de la Libération qui l’a porté en triomphe après le 4-0 contre Amiens, synonyme de montée historique pour le club de la Côte d’Opale lors de la dernière journée de la saison 2008/09.

Fauré et Duhamel, deux vrais tops

Autre buteur centenaire ayant marqué de son passage la Ligue 2 BKT (101 buts), Cédric Fauré a connu des montées avec le TFC, Reims et Guingamp en 2003, 2012 et 2013, en chipant au passage les deux premières fois le titre de meilleur buteur (20 et 15 buts). Un joli pourcentage de réussite rappelant celui de Toifilou Maoulida (54 buts en carrière), qui a connu la montée lors de ses trois premières saisons : MHSC en 2001, RC Lens en 2009 et SC Bastia en 2012 !

Mais contrairement à l’homme aux bandelettes, qui n’a jamais passé plus d’une saison de suite à ce niveau, Cédric Fauré n’avait pas accompagné le club rémois après avoir été l’un des principaux acteurs de la montée, à 33 ans. Club où il a passé quatre saisons et demie dans l’antichambre pour 58 buts inscrits, en ayant parfaitement assuré la suite de Julien Toudic, parti à l’été 2011.

Cédric Fauré avait découvert ce championnat à toute vitesse avec un doublé dès sa première avec les Violets en 2002. Top buteur dès sa 1ère saison pro (20 buts) et élu meilleur joueur de la saison par l’UNFP, Fauré a impressionné. « Cédric fait les choses avec un tel niveau d'engagement que les défenses de Ligue 2 ont bien du mal à le contenir. », expliquait son coach toulousain Erick Mombaerts en 2003. Une saison de néophyte passée aux côtés d’un pitchoun à l’époque, Jérémy Blayac (19 ans), venu de Rodez deux ans plus tôt. Tout Comme Fauré, cet attaquant s’est fait un nom par la suite en D2, où il a compilé 49 buts en 258 rencontres tout en décrochant deux titres de champions à quatorze ans d’intervalle (2003 et 2017 avec Strasbourg), auxquels il convient d’ajouter une montée avec le Boulogne de Thil en 2009 et encore une autre avec Angers SCO (2015). C’est en Ligue 2 BKT que ce porte-bonheur (six montées au total en carrière), relancé par Philippe Montanier dans le Nord en 2008, a tiré un trait sur sa carrière à 36 ans avec un Gazélec relégué en National (2019).

Dix ans après la première saison faste de Fauré au TFC, Jocelyn Gourvennec qui venait de le recruter à Guingamp en Ligue 2 BKT avait bien identifié l’apport direct que pourrait avoir un tel attaquant. « C’est un joueur très intuitif et adroit devant le but. Ce n’est pas qu’un finisseur. Si Ghilas a fait une superbe saison à Reims, c’est aussi grâce à Cédric, un joueur très expérimenté ». Une belle inspiration puisque les Bretons ont décroché leur billet pour la Ligue 1 Uber Eats en fin d’exercice. C’est d’ailleurs en Bretagne à 34 ans que Fauré a inscrit son 101e et ultime but dans le championnat, en avril 2013. Comme l’a dit Gourvennec à son départ en 2014, Fauré « a été heureux à Guingamp, même s’il n’a pas beaucoup joué. Il s’est toujours comporté en vrai pro ». L’ancien Pitchoun avait développé de solides qualités collectives, le rendant « irréprochable dans l’état d’esprit ». Une valeur capitale dans un championnat qui compte de nombreux jeunes à encadrer.

Présent avec l’EAG la saison suivante parmi l’élite, « Faurégol » n’y a passé que six mois (4 matchs), avec une blessure à la cuisse venue contrarier son 4e passage en Ligue 1 Uber Eats, où il rêvait « de prouver sa capacité à s'imposer. » Mais ni dans sa jeunesse toulousaine, ni au Mans, ni au HAC et enfin à l’EAG, le buteur n’a concrétisé en Ligue 1 Uber Eats. En faisant le bilan de sa carrière en mai 2017 pour le site Les Violets.com, Cédric Fauré a avoué ne pas savoir ce qu’il s’était passé au début : « j’ai mis 10 buts pour ma 1ère saison en L1, on a réussi à décrocher le maintien…et on m’a dégagé ».

Issu du monde amateur, où Gérard Rabier et le Téfécé « sont allés le trouver là où personne ne serait allé le chercher », comme un Gaëtan Courtet à ses débuts lorientais, Cédric Fauré a évoqué cette concurrence accrue au plus haut niveau. « J’ai eu la malchance de débuter quand les buteurs de renom tels que Djibril Cissé, Alexander Frei, Didier Drogba et Pedro Pauleta étaient au top », expliquait-il en 2008 pour Football365, tout en reconnaissant qu’à cette époque, des efforts sur l’hygiène de vie devaient accompagner un passage aussi rapide dans le foot professionnel : « je n’ai certainement pas donné mon maximum en termes d’investissement personnel. Mais, à mon goût, on a trop vite oublié que cette saison 2003/04 était ma première au sein de l’élite et que, à peine un an et demi avant, je travaillais encore à côté de mon activité de footballeur. »

En 2004, Erick Mombaerts a confirmé cette difficulté : « Notre milieu du football est impitoyable. Les jeunes n’ont pas eu le temps d’élever leur niveau de jeu, il y a un tel écart entre les deux championnats. Cédric était meilleur buteur en Ligue 2, mais il ne l'est pas en Ligue 1. »

De son côté, Mathieu Duhamel, pur Normand, a claqué 79 buts en Ligue 2 BKT (196 matchs), où il a connu les sommets. Une réussite qui n’a pas non plus été forcément suivie d’un changement de statut chez les buteurs.

Si le déclic est venu lors d’un prêt à Metz (janvier 2011), l’attaquant a concédé « qu’avoir un entraîneur (Patrice Garande) qui a été un avant-centre de renom, ça m’a fait passer un énorme palier au SM Caen. Il m’a apporté son savoir de buteur. Avec lui c’est plus qu’un rapport joueur-entraîneur » Et d’ajouter : « Je suis un joueur d’instinct, je fais comme je le sens devant le but. Avec le gardien adverse, c’est un jeu de poker menteur. Mais le coach m’a fait travailler mes gestes parce que l’instinct seul ne suffit pas ». Un travail payant puisqu’en fin de saison en terre normande, Duhamel a atteint son objectif en décrochant à la fois la Ligue 1 Uber Eats et le titre de meilleur buteur du championnat (24 buts), en tenant tête à Andy Delort (Tours FC) lors de l’ultime journée après avoir marqué 13 fois lors des treize derniers matchs.

Pour Garande au moment de cette accession (2014), son avant-centre « a le niveau pour évoluer en Ligue 1 Uber Eats. Il a compris que pour marquer il fallait la lucidité pour faire le bon geste ». Mathieu Duhamel ne se sert désormais plus uniquement de son pied gauche pour marquer. Pourtant, comme d’autres avant lui, il est arrivé un peu de nulle part en perçant presque tardivement sans avoir connu de centre de formation (24 ans). « J'ai galéré oui, mais c'est aussi ce qui fait ma marque de fabrique, je ne lâche rien », rappelait-il lors à son époque grenat. Connu pour son franc-parler, l’avant-centre estime pour sa part avoir manqué de reconnaissance. « J'ai inscrit 24 buts en Ligue 2, je pense que ce n'est pas rien. Et pourtant, certains disaient - On ne sait pas s'il va marquer en Ligue 1 - J'aimerais bien être reconnu à ma juste valeur », constatait-il pour France Football en mai 2015, quand il a enfin découvert l’élite à 30 ans. De quoi faire de Mathieu Duhamel un membre de la confrérie des buteurs « made in Ligue 2 BKT ». Presque une destinée pour celui qui y avait débuté à la Rabine avec l’ESTAC de Jean-Marc Furlan à l’été 2010. Ce qui ne l’a pas empêché d’être ambitieux et compétiteur. « J’ai toujours détesté perdre, même à l’entraînement. Ça me prend aux tripes. J’étais peut-être trop perfectionniste ». Cet « excès » aurait-il pu jouer un rôle dans son image de cas difficile à gérer pour avoir davantage sa chance en Ligue 1 Uber Eats ? Pas selon le joueur qui a avancé sur France Bleu que « les meilleurs attaquants du monde ont du caractère ! ».

Suarez, bien en Ligue 2

Top buteur de Ligue 2 BKT en 2003/04, David Suarez a lui scoré à 64 reprises et fait partie de ces attaquants catalogués comme spécialistes de ce championnat, où il a notamment contribué à la montée du SC Bastia en 2011/12. « J'ai connu la 1ère Division, je n'ai pas eu la réussite nécessaire pour y perdurer (…)Y jouer était un rêve, je l’ai réalisé, maintenant je préfère jouer un rôle important dans des très bon club de Ligue 2 BKT que d’être relégué dans un rôle plus effacé dans l’élite », résumait l’attaquant à la fin de sa carrière. Une analyse partagée par d’autres buteurs épanouis, mais sans doute moins comprise par le duo Fauré-Duhamel.

Autre profil, celui d’un Julien Viale. Passé notamment par le Stade Lavallois et ayant entamé sa carrière avec les meilleurs en Ligue 1 Uber Eats, l’attaquant formé à l’OL a terminé avec 59 buts en 286 matchs de Ligue 2 BKT entre 2005 et 2017. Championnat qu’il n’a plus quitté après des débuts en fanfare au sein de l’ogre lyonnais en 2004 et 2005 (double champion de France). Attaquant de soutien – « Je n’ai pas la mentalité de frapper dans toutes les positions » -, notamment associé à Gimbert ou encore Cheick Diabaté, ce pur Lyonnais avait débuté en pro dans le sillage de Sonny Anderson et Peguy Luyindula à l’OL. Ensuite, l’attaquant aurait aussi la retrouver quand l’AC Ajaccio y est promu, mais une blessure a coupé court à toute éventuelle prolongation…

Yohann Rivière est un autre buteur de métier qui a touché la Ligue 1 Uber Eats du bout du doigt (2003/04 et 2016/17), mais qui s’est surtout exprimé à l’étage du dessous. « J'étais en 1ère Division, j'ai été titulaire contre Monaco, j'ai découvert le Parc des Princes, c'était le top. Mais ça n'a pas toujours été simple. J'ai connu des blessures et ensuite j'ai eu moins de temps de jeu », a résumé l’ancien Guingamp, Dijonnais et Havrais au Parisien. Rivière qui n’allait pas non plus par quatre chemins pour donner ses qualités, celles qui font généralement de solides finisseurs à l’échelon inférieur : « Je ne suis pas un joueur très technique qui fait 10 000 passements de jambes ! Mon registre, c'est le jeu en appui, le combat. J'ai bâti ma carrière comme ça, sur mon physique et l'envie. » Ce qui a aussi permis au Bigouden de faire partie de l’équipe guingampaise victorieuse de la Coupe de France (2009) et de compiler 71 buts en 321 rencontres.

Dufresne avait choisi son championnat

Encore plus attaché à la Ligue 2 BKT, Laurent Dufresne y a marqué 96 buts en carrière en y démontrant un attachement tout particulier. Car lui n’a pas toujours fait de l’élite un objectif prioritaire, n’hésitant pas à privilégier une saison réussie à l’échelon inférieur. L’homme de trois montées a certes foulé les pelouses de l’élite une soixantaine de fois, mais il s’est surtout épanoui en Ligue 2 BKT. Triple champion à ce niveau avec trois clubs différents (Châteauroux en 1997, l’ASNL en 2005 et le VAFC en 2006), le Calaisien est connu pour avoir préféré y rester plutôt que d’accompagner Nancy, où à 33 ans il avait un an de contrat, en Ligue 1 Uber Eats en 2005. Choix atypique également fait par un autre buteur, Richard Socrier, deux fois de suite vice-champion de Ligue 2 BKT avec Brest (2010) et l’AC Ajaccio (2011).

Chez lui dans le Nord, Laurent Dufresne a formé un duo avec Steve Savidan, qui a profité de leur entente pour terminer la saison en sommet du classement des buteurs (16 buts). A égalité avec Jean-Michel Lesage (HAC).

La concurrence du poste

Parmi tous les buteurs qui ont connu une grande réussite en Ligue 2 BKT, certains n’ont pas toujours eu de réelles chances au niveau supérieur. « Faut se rappeler qu’à notre pic, on avait devant nous des joueurs comme Papin, Henry, Trezeguet, Onnis pour les plus anciens. » glissait dans So Foot Robert Malm, goleador des années 1990-2000 au sujet des buteurs pour lesquels la Ligue 2 BKT a représenté leur sommet.

La position de n°9 est particulièrement concurrentielle. Et à la différence des autres postes, les stats peuvent avoir un rôle de juge de paix.

L’attaquant des années 1990-2000 Lilian Compan était revenu sur cette dure concurrence, accusée de l’avoir ralenti dans sa progression et obligé à passer plus de temps du côté de la 2e Division. Car à 20 ans, l’attaquant avait quitté l’AS Cannes pour l’AJ Auxerre, où il est arrivé en qualité de remplaçant de l’international Stéphane Guivarc’h. Comme avait aussi pu le constater à ses défauts Didier Monczuk quelques années avant lui, Guy Roux a toujours compté sur de solides titulaires et les déloger du onze-type icaunais n’était pas chose facile. « La marche était trop haute », a confié Compan à footdavant.fr. « Il fallait que je refasse mes gammes, que je marque des buts, que je me fasse un nom même si j’avais commencé très, très jeune en D1 et que j’étais en équipe de France Espoirs. » C’est comme cela que Lilian Compan a découvert l’échelon inférieur lors de deux prêts successifs à Créteil et à Châteauroux, signant respectivement 13 et 14 buts. Réputation faite, l’avant-centre a ensuite participé à la remontée parmi l’élite de Saint-Etienne en 2004 avec ses 11 unités. Au final, l’attaquant a marqué à 69 reprises en Ligue 2 BKT, y a donc obtenu un titre de champion et y a aussi vécu l’un des plus grands moments de sa carrière, justement le soir du titre avec les Verts contre Châteauroux lors de la dernière journée. Mais il ne s’est pas arrêté là, puisque le Varois a connu deux autres montées, d’abord avec le SM Caen en 2007, qu’il a fini par quitter un an plus tard de peur de faire banquette avec l’arrivée de Steve Savidan, puis sous les couleurs du Montpellier HSC deux saisons plus tard.

La concurrence du poste est un sujet également abordé par Julien Toudic, qui malgré trois saisons en Ligue 1 Uber Eats (58 rencontres pour 4 buts), aurait « dû avoir un peu plus de chance, mais à l’époque il y avait aussi de grands joueurs. Il y avait beaucoup de concurrence et je n’étais pas toujours titulaire », surtout chez lui, au SM Caen, qui comptait dans ses rangs Gouffran et Savidan. Mais sa philosophie se rapproche de celle d’un David Suarez : « Je préfère faire 300 matchs en Ligue 2 BKT que très peu au niveau supérieur. » Et d’ajouter du haut de ses 53 réalisations dans l’antichambre : « On va dire que je prenais vraiment plaisir dans ce championnat, tandis qu’en L1 je ne faisais que des bouts de matchs. J’ai fait le choix de me consacrer à l’étage inférieur. Cela reste une bonne expérience où j’ai marqué beaucoup de buts. »

Lesage pour l’amour du jeu en Ligue 2

Enfin, Jean-Michel Lesage a connu l’élite pour une centaine de rencontres, notamment à ses débuts en 1999. Mais celui qui a eu le Parc des Princes comme terrain pour sa première et signé plus tard ses premiers buts à Deschaseaux contre le même PSG de Bernard Lama (octobre 1999), a ensuite surtout réservé sa vista à l’étage inférieur. En 2e Division, Lesage et sa patte gauche ont été deux fois meilleur buteur (2006 et 2007), une fois repositionné devant par Thierry Uvenard au Havre. Au total, le gaucher a compilé 82 réalisations en 312 apparitions entre juillet 2000, au sein du HAC d’Alain Caveglia, et mai 2016, avec Créteil jusqu’à à 39 ans. En Normandie, le célèbre n°22 a résisté aux sirènes de la Ligue 1 Uber Eats. « Si c'était pour aller dans un club qui n'allait jouer que le maintien, ce n'était pas la peine. Il est plus excitant de jouer la montée, et puis l'argent, ce n'est tout de même pas tout dans la vie », annonçait-il à l’automne 2006. Et ce pour le plus grand bonheur du président Louvel, puisqu’il a contribué à ramener le HAC parmi l’élite un an et demi plus tard, en constituant un duo hors-pair avec Kandia Traoré (50 buts), avec lequel il a terminé en tête du classement des buteurs.

A Créteil de 2013 à 2016, JML a dégainé plus vite que son ombre et a signé des buts incroyables des 40 mètres. « C’est Lucky Luke. C’est contrôle et vlan. Et le contrôle est facultatif. Sans s’emballer, on peut dire qu’il a encore aujourd’hui une des plus belles frappes de France » estimait son ancien coach Thierry Uvenard dans So Foot en 2013, quand Lesage était revenu à ses origines cristoliennes à Duvauchelle. A l’image d’un Grégory Thil à Boulogne ou d’un Mathieu Duhamel à Quevilly, Jean-Michel Lesage est revenu au bercail, prouvant que ces canonniers estampillés Ligue 2 BKT partagent souvent l’attachement à leurs origines et…à ce championnat.