A 31 ans, Florentin Pogba est l’une des raisons du bon classement du FC Sochaux-Montbéliard cette saison (4e) dans un rôle de leader au sein de la co-meilleure défense de Ligue 2 BKT. Entretien.
Dans sa deuxième saison au FC Sochaux-Montbéliard, Florentin Pogba (31 ans) a retrouvé la saison passée la Ligue 2 BKT, où il avait effectué ses débuts professionnels avec Sedan il y a 10 ans. Après une blessure qui l’a privée des deux dernières journées, l’international guinéen est de retour au bon moment, puisque les Lionceaux se rendent à Toulouse samedi (15h), avec un bilan avantageux à l’extérieur et une seule défaite subie en 7 déplacements. L’occasion d’échanger avec cette force tranquille qui s’est notamment construite par ses nombreuses aventures à l’étranger de Vigo, où il est resté deux ans en formation, à Atlanta en MLS, en passant par la Turquie (Ankara).
Florentin, le FCSM réalise une solide première partie de saison à seulement deux points de la tête occupée par le Toulouse FC. Qu’est-ce qui a changé par rapport à la saison passée ?
D’abord, le classement (rires) ! Je dirais que l’on a peut-être un peu plus de qualité dans l’effectif que la saison passée, mais la principale différence est que nous sommes bien plus efficaces avec davantage de régularité. On parvient à tenir 90 minutes. Ce n’est pas, on joue bien en première période, puis on dort en seconde. Ensuite, nous sommes plus performants sur les matchs serrés, en réussissant souvent à tenir notre avantage (21 points pris sur 21 possibles après avoir ouvert le score cette saison). Nous avons une vraie solidité.
En effet, défensivement le FC Sochaux-Montbéliard est un sacré client (8 clean sheets en 12 matchs). Avez-vous changé quelque chose par rapport à l’exercice passé ?
Non, nous avons le même coach avec la même base et les mêmes méthodes à l’entraînement. L’équipe défend mieux collectivement, mais nous avions déjà une bonne défense la saison dernière : la quatrième plus performante en finissant 7e au classement. Les efforts défensifs de chacun payent. Nous continuons donc sur cette lancée avec la co-meilleure défense (8 buts concédés, à égalité avec Ajaccio et Le Havre).
« Avec Ismaïl Aaneba, la confiance est réciproque »
Une efficacité qui vient notamment de votre entente avec Ismaïl Aaneba. Parlez-nous en.
Je suis agréablement surpris par Ismaïl. Car je ne le connaissais pas plus que ça. J’avais entendu parler de lui, qu’il avait commencé comme latéral. Donc à son arrivée, j’ai cru que c’était son poste. Mais finalement, il est venu avec moi en charnière centrale. Et le feeling est passé tout de suite. Tout coule de source entre nous : on communique bien, avec beaucoup d’automatismes qui se mettent bien en place. Entre nous, la confiance est réciproque.
Votre match de samedi à Toulouse sera du coup une opposition de style, puisque le TFC est la meilleure attaque de Ligue 2 BKT avec 32 buts.
Ce match est attendu. Je pense que ça va être plaisant à suivre. C’est une équipe qui en effet marque beaucoup de buts, mais qui peut aussi en prendre, en laissant des espaces. Nous sommes confiants et déterminés.
Avez-vous mis en place une stratégie spéciale pour les contenir ?
C’est une équipe qui marque beaucoup sur les centres et aussi depuis l’extérieur de la surface (1ère du championnat avec 5 buts). Le travail défensif devra être bien précis. L’objectif sera de faire ce que l’on réussit à bien depuis le début de la saison, comme limiter le nombre d’occasions adverses.
Plus largement, quel est votre rôle depuis que vous avez rejoint l’équipe sochalienne ?
Omar Daf compte sur moi. J’ai un rôle de grand frère sur et en dehors du terrain, déjà du fait de la différence d’âge que j’ai avec beaucoup de joueurs de l’équipe. Je ne porte pas le brassard, mais c’est tout comme. C’est quelque chose de naturel chez moi : je suis un protecteur avec du leadership. Par exemple, je peux aider les jeunes sur le plan mental, en apportant mon soutien lorsqu’ils ont un coup de moins bien. Quand je vois que certains doutent, je discute et les encourage. Si je peux être là pour les aider, je le fais avec plaisir.
« J’ai un bon jeu de tête défensif, l’offensif ce n’est pas trop ça… »
A vos débuts, avez-vous également pu évoluer sous l’aile protectrice d’un aîné ?
Du côté de Sedan, Ismaël Traoré a été comme un grand frère avec moi. Il a eu ce rôle que je peux avoir aujourd’hui à Sochaux. Lors de mes débuts là-bas, il m’a tout fait découvrir : comment cela se passait avec le coach, ce qu’il fallait savoir. C’était mon guide lors de mes premières années en pro. A l’époque, les jeunes étaient moins nombreux en Ligue 2 et ils étaient aussi lancés moins rapidement.
Du coup, quel type de défenseur êtes-vous devenu à son contact ?
Je ne suis pas un défenseur qui tacle. J’essaye de rester le plus longtemps debout et de gagner le plus de duels possibles. Ma force est d’abord d’être performant dans ce domaine. Ensuite avec le ballon, j’ai un bon jeu long. J’ai aussi un bon jeu de tête défensif, mais pas l’offensif, ce n’est pas trop ça ! Après, je n’ai pas l’habitude d’avoir la pression. Je ne suis pas quelqu’un de stressé. Je suis très confiant. Peu importe qui est en face de moi, je donne le maximum. Si un jour j’ai la chance de jouer la Ligue des Champions, j’aborderais la chose de la même façon sans appréhension, avec une pression positive.
Sur le plan mental, comment préparez-vous vos matchs ? Avez-vous une routine ?
Le jour du match, je me mets dans mon monde en écoutant de la musique. Et une fois que je suis sur le rectangle vert, c’est la guerre. Ça veut dire : j’ai un attaquant face à moi aujourd’hui, c’est lui contre moi. Ce que je veux c’est gagner les duels. Mais les jours précédents, je suis tranquille, en famille. Pas de pression.
Ce mental solide a-t-il été forgé lors de vos expériences à l’étranger, notamment à Vigo que vous avez rejoint à 17 ans ou encore en Turquie plus récemment (2018) ?
Jouer loin de chez soi, dans un pays qui ne parle pas ta langue, en étant le seul français du groupe ou encore le seul noir, cela te forge clairement un mental. Ça m’a amené à me concentrer sur moi pour pouvoir avancer. Le mental a vraiment été déterminant en partant si jeune à l’étranger. Quand il t’arrive de ne pas beaucoup jouer, que tu n’as ni la confiance du coach, ni celle des autres joueurs, et que tu n’as pas de soutien, c’est indispensable d’en avoir un bon pour ne pas craquer.
Parmi vos expériences, vous avez aussi évolué en MLS...
Après la Turquie, c’était compliqué de trouver un club. Je n’y suis pas resté très longtemps (5 mois entre 2018). Je me suis dit que j’allais essayer, que cela me ferait une nouvelle expérience sur un nouveau continent. C’était un challenge pour moi. Je suis content d’avoir pu jouer en MLS. J’y ai affronté des légendes comme Nani ou encore Schweinsteiger.
« Les appels de Cavani, c’est létal »
Et vous avez aussi été coaché à Atlanta par Frank De Boer, une légende des Pays-Bas (112 sélections). Ancien défenseur et gaucher comme vous, comment s’est passée votre relation ?
Ça s’est bien passé avec lui. Il avait confiance en moi. Mais par malchance, une petite blessure est venue au moment où je commençais à enchaîner les matchs. Cela m’a stoppé et comme l’équipe obtenait de bons résultats, je suis le plus souvent resté sur le banc. Mais c’était super là-bas avec beaucoup de jeu. De Boer avait une philosophie de jeu qui me convenait. Il ne voulait pas que l’on dégage le ballon, mais au contraire que l’on joue. Tous les deux, on s’amusait à prendre un ballon et à se claquer des passes, des bien appuyées. J’adorais ça ! On se challengeait…et ça faisait aussi travailler les contrôles.
Lors de vos années stéphanoises en Ligue 1 Uber Eats, vous avez aussi croisé la route de grands joueurs. Lesquels ont été les plus marquants ?
Il y a deux Parisiens qui étaient au-dessus. D’abord, Edinson Cavani. Lors de la première saison où j’ai joué face au PSG, il m’a impressionné par ses appels. Il se place parfaitement pour ne pas être hors-jeu. C’est létal. Il est toujours en mouvement, va vite… Et l’autre, c’est Zlatan. Il est intelligent, toujours bien placé, jamais dans le duel. Face à lui, je n’ai même pas souvenir d’avoir eu à en livrer. Il préfère se mettre entre les lignes. Et dans un autre style, il y a Verratti. Lui, la pression, il ne connaît pas…
Enfin, finissons sur une jolie note. Quel est votre meilleur souvenir sur un terrain ?
Il y a forcément mon premier match en Ligue 1 (entrée en jeu à Montpellier avec l’ASSE, en décembre 2013) et les deux confrontations contre Manchester United (février 2017 en Ligue Europa) qui m’ont permis d’affronter mon petit frère (Paul Pogba). A Old trafford, tout était réuni pour nous pousser à sortir le match. Il n’y avait que de la joie avec la famille en tribunes. C’était incroyable comment j’étais concentré ce jour-là. J’ai tellement donné sur ce match que j’ai été contraint de sortir pour des crampes.