Romain Thomas (SM Caen).
Interview

Romain Thomas : « On n’en fait pas assez pour prétendre à la montée »

Romain Thomas : « On n’en fait pas assez pour prétendre à la montée »

Interview
Publié le 10/01 à 10:16 - NM

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Capitaine du SM Caen, Romain Thomas se livre avant le match face aux Girondins de Bordeaux ce mardi et dresse, en toute transparence, le bilan du début de saison du club normand.

Le SM Caen reçoit les Girondins de Bordeaux ce mardi. N’est-ce pas le match idéal pour enclencher une nouvelle dynamique et revenir sur le trident de tête ?
Évidemment. Nous, ce qu’on veut, c’est retrouver la victoire. C’est vrai que depuis un petit moment, on rencontre des difficultés à gagner en championnat et il faut qu’on stoppe cette série. On va rencontrer une belle équipe, une équipe en pleine confiance. Après, c’est un match à domicile et, généralement, ça nous réussit plutôt bien, donc j’espère qu’on va continuer sur notre lancée. Avant de penser au classement, il faut vraiment qu’on se concentre sur le contenu et qu’on se relance avec une victoire qui donnerait de la confiance au groupe.

Un succès permettrait tout de même au SM Caen de ne pas être trop détaché…
Sincèrement, pour être en haut, il faut enchaîner les victoires. On voit bien que Bordeaux et Le Havre ne laissent pas beaucoup de points en route et se trouvent logiquement en tête du classement. Nous, on en a laissé, notamment lors des deux derniers matchs dans les dernières minutes, donc l’objectif, c’est déjà d’essayer de reprendre trois points et de repartir sur une dynamique positive.

Comment expliquez-vous ces points perdus lors des deux derniers matchs ?
Je ne vais pas être très original. Il y a eu des fautes de concentration et un peu de fatigue. Contre Saint-Etienne, je ne vais pas dire qu’on a été acculé sur notre but, mais ils ont poussé sur la fin de match et on n’a pas réussi à tenir. On doit progresser dans la concentration et apprendre de nos erreurs. Même avec de la fatigue, on doit savoir conserver le score. Ce qui est dommage, c’est que c’est arrivé deux fois lors de la même semaine. J’ai l’habitude de dire qu’on apprend de nos erreurs, mais force est de constater que là, on n’a pas appris de notre défaite à Bastia. On a un groupe jeune et il faut réussir à gagner en régularité.

Plus globalement, quel est votre regard sur le début de saison du SM Caen ?
Il est irrégulier. On réalise un très beau parcours à domicile mais on est en difficulté à l’extérieur. C’est la raison pour laquelle on est aujourd’hui à la 7e place. On a du mal de week-end en week-end à reproduire nos performances. On a aussi eu pas mal de blessés durant cette première partie de saison alors qu’on sait très bien qu’il faut pouvoir compter sur un maximum de joueurs présents pour prétendre à être bien classé. On n’est pas mal classé non plus, mais si on veut prétendre à autre chose, il faut gagner en rigueur. On doit s’améliorer sur les détails au quotidien, tous ensemble.

« On doit se faire violence à l’extérieur »

Qu’est-ce qu’il manque à l’équipe pour qu’elle devienne plus constante ?
Il faut qu’on arrive à imposer un peu plus notre jeu et à tuer les matchs. L’énergie et la folie qu’on arrive à mettre à d'Ornano, il faut qu’on arrive à les retranscrire à l’extérieur. C’est aussi dans les têtes que ça se passe. On a beau en discuter, travailler à l’entraînement, il faut que tout le monde ait la même prise de conscience pour être performant chaque week-end. Il ne faut pas se contenter d’être bon un week-end sur trois. J’aimerais qu’on arrive à faire des séries de victoires sur trois ou quatre journées. Cela nous permettrait de valider ce qu’on fait de bien.

Pour revenir sur vos performances à l’extérieur, vous n’avez plus gagné en déplacement depuis la première journée et votre match à Nîmes…
C’est quelque chose qu’on doit travailler. On doit se faire violence à l’extérieur. A d'Ornano, c’est vrai qu’on joue toujours devant un public nombreux, alors qu’à l’extérieur on tombe parfois dans des ambiances un peu moins folles. Je ne vais pas dire que ça joue sur la motivation mais peut-être un peu sur la concentration et l’énergie mises sur le match. Peut-être qu’on a tendance à tomber dans un faux rythme. Mais c’est à nous de savoir régler ce problème et ce n’est pas faute de se le répéter lors des échauffements. On va devoir modifier ça sur la deuxième partie de saison et se montrer plus acteurs car on a certainement été trop passifs par moments. Aujourd’hui, la Ligue 2 BKT est sincèrement âpre. Ça ne se joue pas à grand-chose, toutes les équipes se valent. Donc, tous les détails, comme les coups de pied arrêtés qu’on donne à l’adversaire, il faut les corriger. On ne concède pas énormément de situations durant les matchs mais à chaque fois qu’on en concède une, on est puni en ce moment… Il faut qu’on travaille individuellement et collectivement sur ce problème.

Vous avez récupéré le brassard de capitaine dès votre arrivée, c’était une nouveauté pour vous, non ?
Tout à fait ! J’avais eu la chance de le porter quelquefois à Angers mais jamais en tant que capitaine numéro 1. J’ai récupéré ce rôle avec grand plaisir et avec l’envie de faire progresser tout le monde. Evidemment, quand on a ce rôle, on se doit déjà d’être irréprochable sur et en dehors du terrain et d’être le plus performant possible.

Qu’est-ce qu’implique ce rôle au quotidien ?
Il faut montrer l’exemple. Je suis le plus âgé du groupe, donc j’essaie aussi d’être le relais du staff. Je fais tout pour mettre tout le monde dans les meilleures dispositions possibles, que ce soit mentalement ou physiquement. Je suis là pour que chacun réussisse à tirer son épingle du jeu à un moment dans la saison. Sincèrement, le groupe vit bien. Au départ, j’ai essayé de prendre mes marques et aujourd’hui je parle beaucoup plus et j’essaie d’apporter le maximum de choses à mon niveau.

« Je n’hésite pas à dire les choses »

Conseillez-vous particulièrement les jeunes de l’effectif ?
J’essaie de reproduire ce que les anciens ont pu faire avec moi à mes débuts. Sans être le vieux chiant, le vieux « con », je n’hésite pas à dire les choses. Quand il faut apporter de la confiance ou de l’exigence, j’essaie d’aller leur parler et leur transmettre un maximum de choses. Une carrière passe très vite et je fais passer ce message car j’aimerais que tous les jeunes de Malherbe puissent avoir un bel avenir. Pour cela, il faut laisser le moins de choses au hasard et prendre le taureau par les cornes dès le plus jeune âge.

Quels sont les domaines sur lesquels vous les conseillez ?
Je peux leur parler du travail de prévention qu’il y a à faire avant l’entraînement. Je peux aussi échanger avec certains sur la façon d’aborder les matchs, avec d’autres sur les placements. Puis, je leur dis qu’il faut savoir se lâcher. Même si c’est vrai qu’au départ on peut être frustré car on n’a pas assez de temps de jeu, il faut savoir prendre son mal en patience et toujours travailler au quotidien. C’est plus facile de lâcher mais, à partir de ce moment-là, il n’y a plus rien qui va arriver. A un moment, le bosseur finira toujours par jouer. Je n’ai jamais cru à l’inverse.

C’est naturel pour vous de prendre la parole ?
Oui. Plus tu vieillis, plus tu développes cette capacité. Quand j’étais jeune, je le faisais beaucoup moins. Aujourd’hui, dès que j’en ressens le besoin et que j’estime que c’est le moment, je m’exprime. D’ailleurs, après le match face à Saint-Etienne, j’ai senti que c’était le moment de dire les choses, pas pour pointer du doigt qui que ce soit, mais pour faire progresser le groupe. Si j’ai quelque chose à dire à un joueur, je préfère m’adresser directement à lui. Quand les choses sont dites dans le respect, elles sont rarement mal prises. Au contraire, si chacun rumine dans son coin, la situation n’avance pas. C’est enrichissant d’échanger et c’est comme ça qu’un groupe progresse plus rapidement. Même si on est tous différents, il faut savoir créer un maximum de cohésion entre nous.

Quel a été votre discours après le match face à Saint-Etienne ?
J’ai dit au groupe de prendre conscience des choses. J’ai rappelé qu’on était dans une dynamique de progression mais qu’il fallait vite apprendre. Quand on a quelque chose entre les mains, l’objectif est de le garder. On ne peut pas laisser les points s’échapper de cette manière. J’ai insisté sur le fait que les semaines avançaient, qu’un championnat passe vite, et qu’à 34 ans je suis venu ici pour vivre des choses fantastiques. Je pense que tous les joueurs ont conscience qu’on ne peut pas laisser des points en route de cette manière, mais je ressentais le besoin d’insister sur ce point.

Qu’est-ce que le coach Stéphane Moulin attend de votre apport ?
Je suis là pour l’accompagner et lui servir de relais. Comme je l’ai dit, au départ, j’ai pris mes marques et je ne suis pas arrivé avec mes grands sabots, j’ai observé et j’ai pris l’atmosphère caennaise. J’ai vu que c’était une ville de foot et j’ai compris où j’étais. Une fois que j’ai compris cela, j’ai pu davantage m’impliquer.

« Dire qu’on va monter cette année, ce serait lunaire »

En quoi consiste ce rôle de relais entre le coach et le groupe ?
Je remonte au coach certains points. Bien sûr, je sais faire la part des choses, je ne suis pas là pour rapporter tous les faits et gestes du groupe. C’est surtout au niveau tactique et technique. Sur des séances d’entraînement, si je vois que certains ont des interrogations, je vais les aider à comprendre la méthode du coach. Et, à l’inverse, je vais aussi donner mon ressenti au coach sur ce que j’ai vu lors des séances. Après, si des joueurs viennent me voir et me disent qu’ils sont fatigués, je le fais également remonter pour, par exemple, essayer d’enlever une séance d’entraînement dans la semaine. C’est mon rôle. J’ai plus de facilité à aller voir le coach que les plus jeunes.

Qu’est-ce qui fait que votre relation est si spéciale ?
Le temps a fait les choses. C’est lui qui m’a relancé dans le monde professionnel, à Angers en 2013. On a une très belle relation. Je peux même dire qu’on se connaît par cœur. Je pense que c’est pour cela qu’il m’a appelé dès la saison passée pour me faire venir ici. C’est la 9e saison qu’on vit ensemble et c’est toujours vivant. On n’est pas toujours d’accord, mais il y a de l’échange, de l’écoute et du respect. C’est ce que j’aime et on se retrouve sur cet aspect humain.

Lorsque l’on a 34 ans et que l’on change de club, ce sont des détails qui comptent ?
J’avais des possibilités de rester en Ligue 1 mais, à 34 ans, ça m’a semblé naturel de le rejoindre ici. Je marche beaucoup à l’affect et je préférais, pour mon dernier contrat, travailler avec des personnes que j’avais déjà connues et en qui j’ai énormément confiance. Puis le projet caennais me tentait bien avec son objectif de remonter en Ligue 1. Une chose pas facile à faire. Caen est un club de Ligue 1 à mes yeux, mais il faut que tout soit aligné. J’ai signé trois ans et j’espère qu’on finira par être récompensé le plus rapidement possible. Je ne sais pas quand, mais ce serait bien, ce serait chouette pour la ville, le club et les supporters.

La montée en Ligue 1 Uber Eats reste votre objectif prioritaire ?
L’objectif est de remonter en Ligue 1 Uber Eats à un moment donné, c’est clair ! Cette année, avec les changements que le club a pu faire, le gros mercato, l’objectif, très sincèrement, est de faire mieux que la saison passée. Si on termine dans les cinq premiers, ce sera une saison réussie. Évidemment, tous les supporters attendent une montée en Ligue 1, mais bon. Nous, on travaille pour être le plus haut possible. De là à dire qu’on va monter cette année, ce serait lunaire. Ce n’est pas manquer d’ambition, loin de là. En étant joueur et en étant sur le terrain, je vois ce qu’on fait et ce qui se fait. Il faut qu’on gagne en régularité sur nos performances pour pouvoir prétendre à une montée. Ce n’est pas le bon message de dire sans cesse qu’on veut monter, car c’est bien beau de le dire mais il faut mettre tous les ingrédients pour cela. Aujourd’hui, on n’en fait pas assez pour prétendre à quelque chose. Il y a trop de détails en notre défaveur. Il faut qu’on en fasse plus individuellement et qu’on soit plus ensemble. Puis, il faut qu’on arrive à faire des séries, c’est de cette manière qu’on était monté avec Angers.