Après un vaste renouvellement à tous les étages cet été, Le Havre ne s'attendait pas à un tel succès : leader surprise de Ligue 2 BKT à mi-saison, le doyen des clubs français va tester mardi face à Sochaux (20H45) ses chances réelles de montée. Déjà vainqueur de son dauphin Bordeaux (1-0) lors de la reprise il y a deux semaines, le Havre AC court seul en tête, avec cinq longueurs d'avance sur les Girondins de Bordeaux et six sur le FC Sochaux-Montbéliard.

Signe d'un engouement nouveau après de trop nombreuses saisons sans relief ni émotions fortes, le match contre Bordeaux s'est joué à guichet fermé au stade Océane (23 000 spectateurs), une première en version Ligue 2 BKT depuis l'inauguration de l'écrin bleu en juillet 2012.

Comme une lueur au bout d'un long tunnel : depuis 2009, le Havre stagne dans l'antichambre de l'élite, avec pour seuls frissons une course à la remontée perdue d'un petit but au profit de Metz en 2016 et un tour de Play-offs à l'issue douloureuse dans l'antre électrique d'Ajaccio en mai 2018. Pour le reste, ce fut morne plaine, à l'instar des trois dernières saisons traversées sous l'ère Paul Le Guen.

Trio flambant neuf

Mais l'été dernier, l'Américain Vincent Volpe, propriétaire depuis 2015, a limogé l'entraîneur pour installer un trio flambant neuf : Jean-Michel Roussier (passé par Marseille, Nancy et Mediapro) a pris son rôle de président, le tout jeune retraité Mathieu Bodmer s'est lancé comme directeur sportif et Luka Elsner, son dernier entraîneur à Amiens (2019-2020), s'est installé sur le banc.

Les trois hommes, qui avaient envisagé plusieurs clubs avant de s'intéresser au Havre, sont arrivés seulement une semaine avant la reprise de l'entraînement, avec un staff technique à recomposer et un effectif à reconstruire dans l'urgence et sans beaucoup de moyens. Mais le trio a vite imprimé sa marque et au seuil de la 18e journée, le Havre reste sur 15 matchs sans défaite en championnat, même si une élimination précoce en Coupe de France fin octobre est venue légèrement ternir le tableau.

« Tout ce qui nous arrive est un peu inattendu », admet le capitaine Victor Lekhal. « On partait quand même de loin. Cet été, il y a eu beaucoup de changements, tout s'est fait sur le tard, mais entre les joueurs qui sont restés et ceux qui nous ont rejoints, l'effectif avait tout de même de l'allure ». « Tout le monde s'est vite mis dans le bain, raconte-t-il. Par rapport à nos qualités et au projet de jeu proposé par le coach, on a rapidement eu des certitudes. Et au-delà du talent, il y a une vraie solidarité dans ce groupe. Ça s'est senti tout de suite ».

« Irrationnel, inexplicable »

Le groupe a bénéficié de l'arrivée d'un contingent de revanchards, des joueurs peu vus la saison dernière comme le gardien Arthur Desmas (Clermont), Christopher Opéri (La Gantoise, Belgique), le défenseur Gautier Lloris (Auxerre, frère du capitaine des Bleus) ou encore Oualid El Hajjam (Troyes). A leurs côtés, Yassine Kechta et Josué Casimir, deux purs produits du centre de formation laissés à la cave par Le Guen, sont devenus d'incontournables titulaires.

« On pouvait espérer une telle première partie de saison, mais l'imaginer, non », avoue le président Roussier. « Lorsqu'on arrive dans un club, c'est pour gagner, bien sûr. Mais que les choses aient été mises en place si rapidement, c'est inattendu. Irrationnel, inexplicable. Il y a une telle cohésion, une telle osmose, une telle fluidité à tous les étages... »

Et surtout une redoutable solidité défensive sur le terrain, puisque le HAC n'a concédé que six buts en 17 matchs de Ligue 2 BKT. Mais pour rester devant, l'équipe a encore des progrès à faire dans l'animation offensive et ne devra rien céder de son étanchéité, à commencer mardi face à la meilleure attaque du championnat (26 buts en 17 matchs).