Interview

Pedro Díaz : « J’ai eu du mal à m’imposer en pro »

Pedro Díaz : « J’ai eu du mal à m’imposer en pro »

Interview
Publié le 18/04 à 12:12 - Arnaud Di Stasio

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Principale satisfaction de la saison bordelaise, le milieu espagnol Pedro Díaz se confie. Son adaptation, son évolution, Albert Riera, Luis Enrique, le fils Zidane… Entretien.

Depuis le début de la saison, tu as joué tous les matchs de Bordeaux (pour 5 buts et 3 passes décisives). Même si tu avais déjà plus de 150 matchs professionnels en Espagne, tu t’attendais à t’adapter aussi vite pour ta première expérience à l’étranger ?
J’ai été très bien accueilli à Bordeaux, ce qui a fait que l’adaptation a été rapide. Ce n’est pas une histoire de matchs, c’est parce que l’accueil a été très bon et, quand c’est comme ça, n’importe qui s’adapte vite ! Si ça me faisait peur de partir d’Espagne ? Au début si, un peu, mais j’avais très envie d’une nouvelle aventure et ce désir prenait le dessus sur la peur.

Depuis octobre, c’est Albert Riera qui entraîne les Girondins de Bordeaux. En quoi est-ce un avantage pour toi d’avoir un coach espagnol ?
Quand il faut parler football, on se comprend plus facilement. Quand on communique, je comprends 100% de ce qu’il me dit et je peux lui dire ce que je pense. Tout est plus facile. Comme je ne suis pas en Espagne et que les personnes qui m’entourent ici parlent français ou anglais, l’entraîneur est le seul avec qui je peux communiquer en espagnol donc, directement, ça a été spécial, et je crois qu’on peut dire qu’on a une relation spéciale.

Ce n’est pas la première fois de ta carrière que tu es entraîné par un ex-international espagnol…
Oui, avant Albert Riera, j’ai eu Abelardo et Rubén Baraja au Sporting de Gijón. C’est une très bonne chose pour nous, les joueurs, parce que ces entraîneurs ont connu le haut niveau donc ils comprennent un peu mieux notre quotidien. Ils savent quand il faut nous rentrer dedans ou quand il faut y aller plus doucement. Et pendant les entraînements, quand ils participent à certains exercices avec nous, tu vois qu’ils ont encore beaucoup de qualités même s’ils ont un âge différent. Quand le coach Riera participe avec nous, ses qualités sont toujours là et il pourrait presque jouer avec nous !

« Luis Enrique a toujours eu beaucoup d’autorité »

Tu as évoqué le Sporting de Gijón, où tu as été formé et où tu as joué jusqu’à l’été dernier, mais tu n’es pas le seul à représenter Gijón et le Sporting en France actuellement. Tu as un peu de concurrence…
Il y a quelqu’un d’autre de Gijón dans le football français ?

Oui !
Qui était au Sporting de Gijón ?

Dans la capitale…
Ah oui, pardon, je pensais à un joueur ! Luis Enrique bien sûr ! Clairement, il est à un autre niveau que moi ! Il a beaucoup plus de grandes batailles derrière lui que moi mais, oui, on représente Gijón et les Asturies en France tous les deux, c’est une bonne chose !

Que peux-tu nous dire sur son image en Espagne ?
Luis Enrique a été le sélectionneur de l’Espagne pendant une période difficile de l’équipe nationale. Maintenant, il est en France et ça se passe très bien pour lui. Il a toujours été un entraîneur avec beaucoup d’autorité et beaucoup de personnalité, en bon Espagnol qu’il est.

« Si je m’améliore physiquement, je vais faire un vrai saut qualitatif »

Pour parler un peu de ton style sur le terrain, toi qui ressors du lot par ta technique et ta vision du jeu, sens-tu que tu joues différemment ici par rapport à comment tu jouais en Espagne ?
Tout à l’heure, on parlait de l’adaptation et c’est sûr que la Ligue 2 BKT est un peu différente de ce que je connaissais. C’est plus physique, avec beaucoup de courses, d’allers-retours, des contacts avec les adversaires qui sont plus durs… Mais il faut s’adapter et utiliser ses qualités au mieux pour apporter à l’équipe. C’est ce que j’essaie de faire au mieux, avec ce que me demande l’entraîneur et ce qui peut aider mes coéquipiers.

Maintenant que tu as disputé presque toute une saison en France, sur quoi dois-tu travailler pour être le joueur que tu veux être ici ?
Là où je dois le plus travailler, c’est au niveau physique parce qu’ici, il y a beaucoup de changements de rythme. Il faut que je sois capable de souvent changer de rythme. Et je crois que si j’améliore cet aspect, je vais faire un vrai saut qualitatif.

À quels milieux de terrain t’identifies-tu ?
Honnêtement, je n’aime pas trop citer des joueurs qui me ressembleraient ou des modèles mais si je dois en donner un, j’aime beaucoup Thiago Alcântara. Il m’a toujours plu. Je trouve qu’il a beaucoup de classe. Je ne me compare pas à lui car il a bien plus de classe que moi mais j’aime beaucoup regarder comment les meilleurs joueurs - et Thiago Alcântara en fait partie - se déplacent et touchent le ballon.

« Les coups francs ? Peut-être ce qui me plaît le plus ! »

En Espagne, tu as démontré ta faculté à marquer sur coup franc et, avec Bordeaux, tu as marqué ainsi contre Valenciennes...
Oui, c’était un très beau coup franc mais c’était surtout mon premier but sur coup franc avec les Girondins. Et en plus, c’était à domicile, devant nos supporters… Ce n’est pas le plus beau but que j’ai mis mais il restera comme l’un des plus particuliers pour moi. Il restera important.

Tu parlais de ton plus beau but. C’était lequel ?
Pour moi, c’est celui que j’ai marqué avec le Sporting de Gijón contre le Rayo Vallecano, à Madrid (entretien réalisé avant son but contre le Paris FC). C’était un but incroyable car j’avais tiré de très loin. C’était un golazo. Et c’était contre le fils Zidane !

Pour revenir aux coups de pied arrêtés, tu avais aussi donné une passe décisive sur coup franc contre Valenciennes. Comment les travailles-tu ?
Peu importe comment tu les travailles… Enfin, c’est important mais une fois que tu as placé le ballon, il faut lever la tête pour identifier où mettre le ballon, voir où sont les espaces et que tes coéquipiers comprennent tes intentions.

C’est aussi simple ?
Aussi simple (rires), non ! C’est plus difficile qu’il n’y paraît. Ça paraît facile mais c’est compliqué car il faut envoyer le ballon à un endroit exact. Je me suis toujours entraîné à tirer les coups francs car c’est peut-être ce qui me plaît le plus dans le football !

Ton capitaine Yoann Barbet est également un spécialiste des coups francs. Comment décidez-vous qui va tirer ?
Yoann tire très bien. La bonne chose, c’est qu’il est gaucher et moi droitier donc on peut alterner tous les deux. En général, on décide sur le moment, selon la faute, le placement du gardien, le mur… Ça dépend aussi de la confiance que l’on a, l’un ou l’autre, à ce moment-là.

« Je suis longtemps resté en équipe réserve »

Certains ne le savent peut-être pas mais, en 2006, tu as joué plusieurs matchs avec les équipes d’Espagne U18 et U20...
(Il soupire). Le temps passe si vite ! Je ne m’étais pas rendu compte que ça remontait à aussi loin… C’est quelque chose de spécial de représenter son pays, l’Espagne pour moi. C’est une des plus belles choses qui soient. La sélection A, c’est encore autre chose, mais j’ai eu la chance de représenter mon pays chez les jeunes. C’est déjà super.

Qui étaient tes coéquipiers de l’époque ?
J’en parlais justement il y a quelques jours avec Albert Riera et Pablo Remon Arteta, son adjoint. Beaucoup des joueurs de cette équipe sont aujourd’hui en D2 espagnole mais il y avait Cucurella de Chelsea et Dani Olmo. Il était très bon ! Il faisait de telles différences physiquement et avec le ballon... Il y en a aussi 2-3 en Liga mais c’est tout. Il y avait un gros niveau et c’était la crème de l’époque mais, ensuite, le football t’emmène sur un chemin ou sur un autre et ça marche plus ou moins bien pour toi. Finalement, ce n’était pas une génération aussi forte que la génération 2000 par exemple, celle des joueurs deux ans plus jeunes que moi, celle de Rodrigo Riquelme de l’Atlético de Madrid.

Pour rester sur les grands noms après Dani Olmo, lors de ta dernière saison à Gijón, tu as joué avec le frère de quelqu’un de très important lors de la victoire de la France au Mondial 2018…
Varane ? Tu me mets à l’épreuve aujourd’hui (rires) ! Jonathan jouait en réserve quand il est arrivé puis il est monté s’entraîner avec nous, en équipe première. Au début, il était un peu nerveux mais ça s’est bien passé. C’est un grand professionnel, très costaud dans les duels. Ça se voit qu’il est français. Il est très bon. C’est drôle mais je n’ai appris qu’au bout d’un certain temps que c’était le frère de Raphaël Varane !

Jusqu’à maintenant, en Espagne comme en France, tu es un bon joueur de deuxième division. C’est une anomalie que tu n’aies jamais joué au-dessus, non ?
Oui ! Bon, le football, ce n’est pas si simple. C’est très compliqué de passer un cap. Moi, j’ai eu du mal à m’imposer en pro. Je suis longtemps resté dans l’équipe réserve de Gijón et j’ai eu beaucoup de mal à passer cette étape. C’est difficile de passer un cap mais j’espère que si ça arrive un jour, je resterai au niveau du dessus ! Ce qui me manque ? La régularité. C’est aussi simple que ça. Il faut que je sois plus constant, que je fasse toujours des performances qui méritent une bonne ou très bonne note.

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